Démonstration de Yabusame au sanctuaire Meiji

Démonstration de Yabusame au sanctuaire Meiji

L'art du tir à l'arc à cheval traditionnel japonais

Chaque année, à la mémoire de l'empereur Meiji, se déroule l'une des plus grandes manifestations d'arts martiaux au Japon, le "Yabusame Taikai du Sanctuaire Meiji". Rendant honneur à la fois à l'empereur Meiji et aux dieux conservés dans le sanctuaire Meiji, cet événement se déroule sous la forme d'une ancienne cérémonie qui remonte à plusieurs siècles.

Yabusame au sanctuaire Meiji Jingu

Yabusame au sanctuaire Meiji Jingu

Journée de la culture et lieu de l'événement

L'événement se déroule le 3 novembre, une fête nationale appelée "Bunka no Hi (文化の日)" ou "Journée de la culture" en français. Ce jour célèbre l’anniversaire de l’empereur Meiji depuis 1948.

Dans les cérémonies traditionnelles japonaises, et en particulier les cérémonies religieuses, les représentations des arts anciens, y compris les arts martiaux, sont choses habituelles. Le Kagamibiraki (la célébration du Nouvel An qui se déroule également au sanctuaire Yasukuni) et les célébrations de Meiji Jingu ne sont que deux exemples parmi d'autres. Vous avez probablement remarqué que les vidéos de démonstrations disponibles sur YouTube sont liées à des événements religieux qui se déroulent dans l'enceinte ou à proximité des sanctuaires shinto.

Pour plus d’informations sur cet événement, le lieu et les démonstrations de Kobubo, veuillez consulter l'article "Kobudo Embu Taikai du Sanctuaire Meiji".

L'entrée du Sanctuaire Meiji Jingu

L'entrée du Sanctuaire Meiji Jingu

Yabusame, l'art du tir à l'arc à cheval à cheval

Le tir à l'arc traditionnel est présent au Japon depuis l'Antiquité et à partir de lui s'est développé le Kyudo, l'art du tir à l'arc. Il est toujours pratiqué à l’époque actuelle au Japon et ailleurs. Lors de la période Heian (794-1185), lorsque les combats à cheval sont devenus plus fréquents, le tir à l'arc à cheval japonais s'est développé; une discipline qui demande beaucoup de timing, d’équilibre et de concentration.

Le Shogun Minamoto no Yoritomo cherchait à perfectionner la maîtrise du tir à l’arc à cheval par les Samouraïs. Pour ce faire, au cours de la période de Kamakura (1185-1333), il imposa un nouveau type d'entraînement : le Yabusame. Sur une piste de 255 m, les guerriers galopent à vitesse maximale et tentent de toucher les cibles le long du parcours avec des flèches non affutées.

Ukiyoe par Chiyoda no Onomote, fin du 19ème siècle - domaine public

Ukiyoe par Chiyoda no Onomote, fin du 19ème siècle - domaine public

Seuls les pratiquants expérimentés sont autorisés à utiliser des flèches pointues pour viser les cibles semblables à des plaques de bois. Si l'impact est assez fort, la plaque se brise et son contenu se répand sur le sol comme des confettis. Atteindre les trois cibles placées le long du parcours est une prouesse admirable et seuls les meilleurs en sont capables. L'emplacement de ces cibles simule la position d'un adversaire, un Samouraï portant l'armure traditionnelle, le "O-Yoroi". Pour effectuer un tir fatal, il fallait atteindre l'ouverture en dessous de la visière - ce qui, compte tenu de la vitesse du cheval, semble presque impossible.

Cet art impressionnant du tir à l'arc à cheval a rapidement gagné en popularité et ces compétitions sont devenues de véritables rituels. L'arc lui-même est un symbole traditionnel de pouvoir et de contrôle puisqu'il s'agissait de l'arme favorite de l'empereur Jinmu. Considéré comme un descendant de la divinité shinto Amaterasu, il est le fondateur mystique du Japon. Dans ce contexte rituel, une cible touchée tout en étant à cheval attire les faveurs des divinités et procure une récolte abondante.

De grandes capacités de concentration et de techniques de respiration permettant d'avoir un esprit apaisé sont nécessaires pour agir et pour manier l'arc calmement. Quel meilleur moyen de parvenir à un tel esprit que de le fusionner avec les enseignements du bouddhisme zen et du Bushido, les codes d’honneur des Samouraïs, ces derniers se développant à peu près au même moment. Combiner la technique avec de tels enseignements mentaux est un concept que l’on ne retrouve pas seulement dans le Yabusame, mais aussi dans presque tous les arts martiaux japonais.

Prêtre shinto du Meiji Jingu effectuant un rituel de purification

Prêtre shinto du Meiji Jingu effectuant un rituel de purification

Un contrôle absolu sur le corps et l'esprit était nécessaire, et particulièrement sur le champ de bataille. Et être autorisé à prendre part aux rituels spirituels zen était un honneur incroyable, atteignant une importance qui a même conduit à des Seppuku (le suicide par éventrement du Samouraï) après une mauvaise performance.

En raison de la disparition progressive des guerres civiles et de l’introduction des armes à feu au Japon, le Yabusame a perdu de plus en plus de popularité au long 16ème siècle.

Cependant, il existe aujourd'hui deux grandes écoles qui perpétuent les traditions du Yabusame : l'Ogasawara-Ryu et son rival, le Takeda-Ryu. Un ensemble de règles, rassemblées dans le "Yabusame-Shaho", a permis la transmission des principes ancestraux de cet art martial japonais raffiné.
Les deux écoles sont sous la tutelle de l'association japonaise de tir à l'arc équestre ("The Japan Equestrian Archery Association"), qui vise activement à préserver et à diffuser cette culture, notamment en mettant à disposition des vidéos en anglais.

En conséquence, le Yabusame est encore présenté aujourd'hui à l'occasion de diverses cérémonies religieuses. Les événements les plus importants sont organisés chaque mois d'avril par le Takeda-Ryu à Kamakura au sanctuaire Tsurugaoka Hachiman et en novembre au sanctuaire Meiji de Tokyo, alternativement par le Takeda-Ryu et le Ogasawara-Ryu. Ces événements spectaculaires attirent les foules, car comprenant également des démonstrations de Kobudo que nous vous avons présentées dans un autre article de blog ; démontrant par la même occasion que la fascination pour le Yabusame rassemble les spectateurs, le pouvoir des archers y est admiré et l'âge d'or des Samouraï se voit ravivé. Et ce en particulier lors des événements au sanctuaire Meiji qui attirent des responsables et des chefs d’État, notamment les présidents Bush et Obama.

Cet art martial fait partie du Kisha, le tir à l'arc à cheval, qui comprend également d'autres disciplines telles que le Kasagake et le Inuoumono . Le Kasagake, comparé au Yabusame, a des cibles différentes et s'est développé comme une sorte de jeu pour pratiquer les éléments techniques du tir à l'arc. L'Inuoumono, que l'on pourrait simplement qualifier de "tir sur chien", était également censé être un entraînement militaire, mais est devenu un sport populaire parmi la noblesse japonaise avant son interdiction à la fin du 16ème siècle. En ce qui concerne le Kasagake, certaines composantes provenant des aspects formels comme le fait de s'incliner ont été intégrées et ont perdurées dans d'autres écoles comme l'Ogasawara-Ryu et sont donc devenues parties intégrantes du Yabusame, qui est devenu l'art représentatif du tir à l'arc à cheval et fait souvent partie de Festivités shinto au Japon.

Quelques compétiteurs avant la démonstration

Quelques compétiteurs avant la démonstration

Le Takeda-Ryu était représenté dans les films de Samuraï classiques, comme dans "Les Sept Samouraïs" d'Akira Kurosawa (1954) et "Kagemusha", l'ombre du guerrier (1980). Le célèbre acteur de Kurosawa, Toshiro Mifune, était un disciple dévoué du Takeda-Ryu.

L’Osagawa-Ryu, avec sa lignée ininterrompue depuis 1187, combinant la pratique du Kyudo (tir à l’arc) mais aussi l’enseignement de l'étiquette, est toujours très présent dans la haute société japonaise. Le groupe est actif, maintient la tradition vivante et moderne, et possède une excellente chaîne YouTube.

Présentation de l'événement du Meiji Jingu par l'Association équestre japonaise

Yabusame, une cérémonie religieuse

Comme décrit précédemment, le Yabusame est également un moyen de vénérer les dieux, qui veillent sur le Japon, encourageant ainsi leurs bénédictions pour la prospérité des terres, des hommes et des corps. Par conséquent, ces cérémonies sont profondément liées à la religion shinto. Une telle cérémonie est divisée en différentes parties :

Shutsujin, "aller au combat"
Au rythme des tambours "Yose no Taiko", les archers et leurs intendants se rassemblent et suivent le chef de cérémonie dans une marche solennelle vers le sanctuaire.

Kaburaya Hoken Kanmon Sojo no Gi, la "cérémonie de présentation de la flèche du combat et la récitation des prières"
Le chef de cérémonie et ses fidèles arrivent au sanctuaire face aux spectateurs. Le responsable de la cérémonie se purifie et cite des prières pour la paix, l'abondance et la bonne santé du peuple. Il reçoit la flèche purifiée pour le combat.

Tenchochikyu no Shiki, la "cérémonie du ciel et de la terre"
Le responsable de la cérémonie et les archers montent sur leurs chevaux. Ceux-ci forment un demi-cercle avec leur chef au milieu. Là, il prie les dieux, pointant son arc vers le ciel et la terre, sans tirer.

Tenchochikyu no shiki

Tenchochikyu no shiki

Kougun, "cortège de troupes"
Une procession commence alors pour conduire les archers à la course, accompagnée du son des tambours.

Subase, "au galop"
Le chef de cérémonie s'assoit au sommet d'une tour pour s'assurer du bon déroulement de la démonstration. Il vérifie que le parcours soit dégagé et que les participants soient correctement placés. Ensuite, les drapeaux pour le départ de la course sont brandis. Prêt pour la course, le chef de la cérémonie frappe le "tambour de la destruction", le "Ha no Taiko" et les archers commencent à galoper : le test est lancé.

Housha, "séance de tir"
Le circuit fait 218 m de long et comporte 3 cibles espacées de 65 m. Les archers, généralement divisés en deux groupes, sont supposés tirer sur les 3 cibles sur leur monture au galop en moins de 15 secondes. La manière dont les cibles sont placées et les cibles elles-mêmes sont présentées de manière à ce que la flèche donne un coup fatal sur un samouraï en armure traditionnelle, visant l'espace situé sous la visière du casque.
Au moment où il tire sa flèche, l'archer crie "Yo in Yo", signifiant lumière et ténèbres.

Kyousha, "concours de tir"
Le concours atteint son point culminant avec la compétition des 3 meilleurs archers. Il consiste à tirer sur une cible ronde de 17 cm de diamètre contenant des confettis. Si elle est touchée, la cible se transforme en une explosion multicolore.
Enfin, le chef de cérémonie frappe le "tambour d'arrêt", le "Tome no Taiko" et décide quel est le meilleur archer alors qu'il est entouré de tous les participants.

Gaijin no Shiki, la "cérémonie de la victoire"
Le meilleur archer s'agenouille devant le chef de cérémonie, qui le regarde à travers un éventail. Ensuite, il frappe 3 fois le tambour et dit "ei ei ei" auxquels les archers répondent par "oh", répétant cela 3 fois.

Gaijin no shiki

Gaijin no Shiki

Naorai Shiki, "cérémonie de clôture"
Le chef de cérémonie et les archers reçoivent l'alcool sacré, le "Omiki", avant de monter à cheval pour clore la cérémonie.

Naorai Shiki

Naorai Shiki

L'événement Yabusame au sanctuaire Meiji en 2018

Comme nous étions occupés cette année à filmer les démonstrations de Kobudo lors de l'événement au sanctuaire Meiji, nous n'avons malheureusement pas pu documenter la cérémonie et le concours de Yabusame. Mais comme les deux dernières années, cet événement majeur figure sur notre liste annuelle, souhaitons qu'en 2018, et grâce aux nouveaux membres du personnel, nous pourrons enregistrer nos propres vidéos et rendre justice à ces incroyables archers.

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